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Anatole Magrin

Anatole Magrin, un consul photographe

L’ambassadeur Gros, qui a influencé la photographie en Colombie, a eu un collègue de la diplomatie française qui s’est illustré aussi dans ce domaine artistique en Roumanie.

 Il s’agit du Consul Anatole Magrin. (Photographie  de 1899).
Né en 1858 dans la commune de Arcey (ou Dompel ?) dans le Doubs, notre jeune homme de bonne famille visite la ville de Constanta, port de la Mer Noire en 1875 lors d’un voyage sur le Danube, venant de Vienne .Se destinant à la prêtrise, nous retrouvons notre homme de nouveau à Constanta en 1878 comme secrétaire du consul de France de l’époque, le conte Delepin.
Que s’est il passé pour lui pendant ces trois années ?
Est-il resté chez son oncle Emil Carré, photographe installé à Galati (sur le Danube) depuis 1855 et dont on dit qu’il aurait apporté l’écriture avec la lumière
Dans cette région, entrée de l’Europe avec le port de Constanta et l’artère vitale du Danube (toujours d’actualité) beaucoup de choses se sont passées.
En effet, entre la Russie et la Turquie, cette région représente de gros enjeux dont les pays européens ne sont pas désintéressés. Rappelons nous la guerre de Crimée de 1856, la convention de Paris 1856 1857 et le traité de Berlin de 1877 qui réintègrent au final l’embouchure du Danube dans l’état de la jeune Roumanie (1862 – Cuza), Roumanie qui sera seulement dans sa forme  à peu près actuelle après la première guerre mondiale.
La guerre d’indépendance de 1877 sera photographiée par Carol Popp de Sathmary, le premier reporter de guerre au monde (voir la causerie sur studio- plus) mais aussi par Franz Duschek de Bucarest, album qui sera donné à la tzarine de Russie, cet album étant conservé dans un musée de Saint-Petersbourg
Notre jeune qui a 20 ans lors de son installation à Constanta fonde une famille , aura  5 enfants et s’implique   dans la vie locale ouvrant un studio de photographie dans le centre de la ville qui s’honore de ce studio selon un témoignage de l’époque.
De secrétaire du consul, il devient vice- consul et ensuite consul de France ce qui probablement lui sera utile pour élever avec la ville (en 1904) un monument aux morts de la France lors de la guerre de Crimée de 1856, de pauvres hères soignés en dehors des lieux de combats, morts de leurs blessures et inhumés dans cette terre lointaine.

Son travail photographique

 Le livre / album Dobrogea , cheia de bolta écrit par Monsieur Arhire nous ouvre grand les portes sur un petit trésor photographique totalement méconnu en occident .Et pour cause.

 Mr Arhire s’est retrouvé en possession d’un album de 46 photographies un peu plus grandes qu’un format carte postale, bien collées dans un album cartonné avec une couverture au titre en lettres dorées « album de la Dobrudgea »mais sans indications.
Apres recherches et recoupements, l’heureux possesseur de l’album se rend compte que certaines de ces images se retrouvent aussi dans un album de 56 photographies en possession du Musée National d’Histoire de Constanta  et dont l’auteur est identifié comme Anatole Magrin, photographe de la Cour Royale.
Album détenu par le Musée d’Histoire de Bucarest et étiquette collée sur la couverture intérieure 3 sur laquelle est écrit : Photographe de la Cour Royale A.Magrin Constanta. Diplôme d’honneur. Couronne de Roumanie médaille d’or etc etc
Donc son album serait un double, sans doute à usage familial ?
Feuilletons l’album dont certaines indications datent de 1897 et 1911.L’auteur se base certainement sur sa connaissance des lieux et de leur configuration historique .Je serai tenté de croire à des photographies prises plus avant dans le temps !
 
La ville de Tulcea : une ville importante dans les guerres entre les russes et les turcs. Le 24 avril 1773, le prince Potemkin la traversera pour aller défaire un corps d’armée turque de 6000 hommes.
La photo du port avec ses chaloupes est beaucoup plus paisible.
La ville de Babadag (baba=père, dagh=montagne en turc).Scènes rurales, des paysans chargeant leurs charrettes au loin dans ces vues panoramiques prises du haut de la colline.
La ville de Constanta.
La célèbre statue, du non moins célèbre poète latin Ovide mort en 17 après JC lors de son exil dans cette ville qui s’appelle Tomis, est photographiée par Magrin qui possède son studio à deux pas, depuis 1884.
La photographie à l’albumine décolorée sur les bords n’occulte pas les panneaux à l’arrière de la statue. Deja, emprise de la publicité quitte à dénaturer les sites ! Heureusement, l’œil du lecteur est attiré par un petit homme avec cravate et chapeau complaisamment assis sur le banc en face d’ Ovidiu….
Des images du port en construction, d’un naufrage au pied de la falaise, de la mosquée et une image de qualité exceptionnelle de l’escadre russe en 1911 etc…
L’album reproduit exactement , dans cette édition de 2010 ,les images faites du phare de Mangalia, des plans d’ensemble dans les villes de Medgidia, de Harsova, Sulina aussi des paysages maritimes etc…
Je termine pour ces images faites en extérieur par celle des chameaux à l’abreuvoir, l’activité agricole et l’élevage étant les principales sources de revenus des tatars venus en horde dès le 17 ème siècle comme l’écrit Marin Ionescu Dobrogianu, cette photo est judicieusement placée avant d’entrer dans le studio de Magrin, où, il me semble, apparaît la valeur des deux albums originaux et de ce livre avec ses reproductions.
Les types humains.
Devant les fonds peints représentant le bord de mer, un jardin de poète, une véranda fleurie, des colonnes et autres fonds neutres sans oublier les feuilles mortes au sol, défilent des turcs, des tatars, des russes, des bulgares, des albanais, des arnautes (soldats mercenaires) et des roumains.
Une histoire longue et compliquée de brassage paisible ou violent, depuis les temps anciens, est résumée devant l’appareil photographique.
Est-ce ce sentiment de sympathie qu’éprouve un consul, par exemple, devant l’oubli de ses concitoyens tombés sur les champs de bataille ou bien le sentiment d’un « exilé » volontaire , bien intégré dans une population cosmopolite vivant des périodes avec ses hauts et ses bas, qui dirige l’œil du photographe.
Je pencherai pour les deux propositions !
Anatole Magrin participe à l’Exposition des Coopératives Roumaines du 29 août 1894 à Bucarest et en 1895 devient fournisseur de la Cour royale en récompense pour son bel album de Constanta et pour…ses services bénévoles envers la police, le parquet et l’hôpital depuis quelques 15 années.
Anatole Magrin décédera vers 1921 ? (La ville d’Arcey mentionne Magrin comme personnage illustre né dans la commune mais décédé en 1893 à Constanta !)
Connaîtra t- il Jean Parmentier, agent de liaison entre l’ambassadeur De Saint-Aulaire et le général Berthelot, chargé d’ acheter du blé de Roumanie ? Ce Jean Parmentier faillit tomber prisonnier à Constanta (un des grands ports européens). Mais ceci est une autre histoire… !.
 Ellge 2011    (Louis Guermond sur Facebook)

 PS : Merci spécial à Mr Dan Arhire pour son aide et à Mr l’architecte Radu Cornescu pour ses images
Quelques références :
 Le livre/album de Dan Arhire Dobrogea Cheia de Bolta Dan Arhire isbn978-973-0-09300-1 Asociatia la drum Tulcea 2010
  • www.cugetliber.ro/1290117600/articol/71656/fotografii-de-anatole-magrin-intrun-album-realizat-de-dan-arhire
  • http://blog.alexgalmeanu.com/wp-content/uploads/2007/12/e_carrez_galati.jpg
  • Cronologia ilustrata a fotografiei din Romania C.Savulescu
  • www.marinarii.ro/marinarii-ro-vizualizeaza-fotografia-TULCEA-2302
  • www.studio-plus.fr/histoire-de-la-photographie/debut-de-la-photographie-roumaine.html
  • www.studio-plus.fr/histoire-de-la-photographie/le-baron-gros.html
  • Constanta. Spectacolul modernitatii tarzii .1878-1928 Doina Pauleanu. Ed Arcade
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