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Comparaison numérique vs argentique en noir et blanc

« Le problème du numérique, c’est que c’est pratique, c’est puissant, mais, du coup, on a plus aucune contrainte… Or il faut des contraintes pour créer. Quand on peut tout faire, on ne sait plus quoi faire. Pour moi, le numérique a tué l’image. Ce qui importe dans une image, c’est trouver le moment juste, et ça, même pour une nature morte, regardez celles d’Irving Penn. Le numérique c’est du bidouillage ça ne veut plus rien dire . D’ailleurs c’est souvent le retoucheur qui fait le style du photographe… » Patrick Swirc photographe Pro pour Télérama, Elle, Libération…

Prise de vue en studio avec une boite à lumière (conditions identiques)

Photo numérique couleur désaturée : Canon eos 5D mk1 + 50 mm

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Photo argentique : leica M6 + 50 mm tri-x dans rodinal 1+25

stage photo paris
Numérique

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Argentique

Sans rentrer dans un long débat où chacunes des techniques a ses avantages, la principale différence, qui saute immédiatement aux yeux, c’est le beau grain sur les parties lisses et la courbe de noircissement typique de la Tri-x que l’on peut tenter de reproduire en numérique avec plus ou moins de bonheur à l’aide de filtres (DXO, Silver Efex Pro…).

Il semble qu’il y ait plus de vie et de relief en noir et blanc argentique (impression 3D).

L’autre caractéristique est la différence de plage dynamique entre le capteur (7 à 8 IL seulement en Jpeg) et le négatif noir et blanc (13 IL) ce qui se traduit par une meilleur gestion des lumières extrêmes, des contrastes et une plage de gris théoriquement plus large en argentique mais pas forcement visible à l’oeil.

Quand à la définition en 35 mm avec des films de 400 ASA, elle est bien sûr inférieure (grain et perte au tirage). Reste que l’on peut peut jouer avec les révélateurs et agir sur le grain, l’acutance, le contraste et la courbe de noircissement pour un résultat choisi. La prise de vue sur film est aujourd’hui une forme de philosophie car elle demande du temps et de l’application, de la volonté même pour transporter des appareils parfois lourds , encombrants ou anciens. On ne mitraille pas, on réfléchit, on visualise avant de déclencher. On choisit le film, le papier, la chimie qui donnera l’effet escompté. Il s’agit davantage d’artisanat que de multimédia……

Test technique sur mire : Leica M7 contre Leica M9

Conditions de prise de vue :

  • Objectif Elmar 3.5 / 24 mm ASPH
  • Le M9 est réglé sur 160 ISO (et rappel :  le capteur du M9 n’a pas de filtre anti aliasing)
  • Film ILFORD DELTA 100 pour le M7 développé dans du D76 avec un contraste normal
  • Lumière ambiante en intérieur
  • Appareils sur pied avec déclencheur souple

Tirage numérique :

  • Impression sur EPSON STYLUS PRO 3800 à 240 DPI sur
  • Papier Epson traditionnal photo paper

Tirage argentique  :

  • Agrandisseur LEITZ V35 + obj. Schneider F 2.8 de 40 mm utilisé à F11
  • Papier ILFORD Multigrade IV

Scans des tirages papier :

Scanner EPSON V700 à 1200 DPI
Output : fichier TIFF 90 MB (couleur pour le M9) et 60 MB (noir et blanc) pour le M7

Leica M9 : mire de test à 160 ISO
Leica M9

Leica M7 + Ilford DELTA 100
Leica M7 argentique

Conclusion

  • La mire 1.1 correspond à 55 lignes par mm
  • La mire 1.25 correspond à 62 l / mm
  • La mire 1.4 : 70 lignes / mm
  • La mire 1.6 : 80 lignes / mm
  • piqué similaire sur les deux appareils soit environ 70 lignes / mm

Numérique vs Argentique

Les deux pratiques sont très différentes :  enrichi par une histoire de plus de 200 ans l’argentique impose  une vrai réflexion artistique, plastique et technique, une attente et le temps de la réflexion,  une démarche avec des choix à faire à chaque étape. Une fois assimilée, cette pratique est pleine de charme et de surprises.

Le choix du format est tout aussi important dans la démarche ; il y a un monde entre le travail à la chambre sur trépied et la prise de vue à main levée au Leica M en 35mm. Pour ce qui est du noir et blanc, une maîtrise complète du processus est nécessaire (développement de vos films…) ; les labos automatisés sont très décevants. Le numérique offre plus de facilité, un conformisme et une certaine froideur.

Choisir sa pratique

« Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage, vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage, polissez-le sans cesse, et le repolissez, ajoutez quelquefois, et souvent effacez.  »  Nicolas Boileau.
La comparaison pour se faire une idée rapidement est assez difficile surtout si vous passez régulièrement d’une technique à l’autre. On « n’essaie » pas l’argentique sur un coup de tête juste pour voir si les photos sont meilleures !
L’analogique demande un vrai travail ; tout le contraire de notre époque impatiente. Il y a beaucoup de questions et de choix techniques à régler avant de commencer à vraiment « faire de la photographie » : choix du format, film, développement…sans parler du tirage (labo argentique avec agrandisseur, scan et jet d’encre ou sous-traiant…). Si vous êtes pressé(e), passez votre chemin !
A ce niveau ce n’est absolument plus une question de pixel ou de résolution. L’idéal est de pratiquer un thème suffisament longtemps par exemple 3 ou 6 mois en numérique, puis oublier le numérique et se concentrer sur l’autre technique. Naturellement une des deux techniques va creuser l’écart en terme de qualité d’image sur le plan artistique.
La création de photographies est un acte complexe. De nombreux paramètres peuvent influer sur le résultat en bien ou en mal. Par exemple le fait de s’habituer à travailler sur trépied en studio avec un viseur inversé du type Mamiya RB67 ou Hasselblad 500C est un vrai challenge au début puis petit à petit on trouve ses marques. Idem pour la focale ; par exemple je ne suis pas du tout à l’aise en studio avec le 90 mm en 6×7 alors qu’avec un 50 mm à mains levée sur un reflex cela fonctionne pour moi. L’approche dans la composition des images en format carré ou rectangulaire est différente…
 C’est un peu le même phénomène en reportage quand on est habitué au reflex puis quand on passe au télémétrique. J’ai mis 1 an pour m’habituer au Leica ; au début les résultats concernant l’acquisition et la composition des images étaient décevants mais j’ai tenu bon (comme on me l’avait conseillé),  l’écart ensuite est devenu important en faveur du télémétrique.
Le workflow est différent en argentique avec des temps d’attente et l’examen des négatifs à la loupe… tout un programme, il me semble que cette lenteur apporte plus de réflexion et d’analyse, une évolution du regard et donc du qualitatif (et une sorte de magie).
Il ne faut pas oublier aussi la motivation qui est un facteur important  (avec des résultats étape par étape)  ; on doit prendre le plus de plaisir possible en photographiant !
Concernant l’outil, s’il est bien adapté à la démarche et en harmonie avec le photographe (qui doit aussi réaliser son autocritique), la créativité se libère petit à petit avec des progrès constants…
« Tout est une question de point de vue. Pour ma part j’ai choisis l’argentique pour sa sensualité, sa magie… Mais je suis persuadé qu’il y a des gens qui prennent des photos numériques en étant inspirés, concentrés, émus, touchés par une magie similaire. Si les photographes du dimanche sont majoritairement en numérique, je pense qu’il y a de vrais photographes numériques, qui savent ce qu’ils font, qui comprennent les choses… non ? Ne soyons pas extrémistes, et concentrons-nous sur les vraies choses… même si je ne suis pas le seul ici à penser qu’il est plus facile de « sentir » et de se concentrer en argentique… » G.Aulmandin.

Pérennité et conservation

Quand on perd une donnée numérique on perd donc tout, il n’y a pas de dégradation physique et progressive du support comme en argentique.
L’argentique ça serait une voiture qui s’use au fil du temps et des kilomètres. Le numérique, c’est la voiture qui ne s’use pas mais subitement prend feu, et il n’en reste plus rien. Le numérique n’est qu’une suite de 0 et de 1 (1 du courant, 0 pas de courant) et sans un support il n’existe pas. Tout dépend donc du support pour la conservation des images numériques. On pense d’abord aux disques durs qui progressivement ont remplacé les bandes magnétiques, mais ce sont avant tout des objets mécaniques qui, pour durer, doivent tourner (alors que les bandes peuvent être stockées très longtemps sans être utilisées).
Personnellement j’ai acheté un disque dur neuf, mais qui n’avait jamais fonctionné depuis sa fabrication (+de 10 ans) ; le disque dur était H.S. On peut aussi stocker sur CD-Rom ou DVD. Il existe des CDs spéciaux destinés au stockage, très chers. Les données incrites sur un CD-R du commerce ne sont en effet nullement garanties dans le temps.

Le point de vue de Patrick Swirc

Restons puristes, je n’aime pas ce que la photo est devenue, on l’a perdue. Avec les nouvelles technologies,  ils nous ont volé la photo. Avant, on parlait d’une histoire d’amour, on sentait la photo, on la respirait, on la touchait, on se laissait habiter. On essaie vaguement de retrouver les sensations mais on n’y arrive plus, même en tirant sur papier, comme il est moins riche en argent, le résultat est aussi moins riche en nuances.  C’est frustrant! Alors oui, je suis nostalgique de ce temps des dinosaures qui faisait rêver le petit garçon que  j’étais. Amoureux, déjà, des appareils. De leur complexité qui nécessitait une connaissance. Aujourd’hui, je travaille  encore avec un Rollei, un Leica et un Nikon. Ils sont toujours à portée, même près de mon lit.  Et il y en a toujours un qui s’impose naturellement suivant le moment.
http://www.swirc.com/

Le point de vue de Ralph Gibson

« La technologie numérique transmet l’information photographique avec une incroyable clarté et précision, et reproduit fidèlement le sujet comme un miroir. Vous avez un sujet et vous prenez une image digitale de ce sujet : vous obtenez une quantité très élevée d’informations sur le capteur.

A l’inverse, le film transcende le sujet en modifiant la réalité. Dans le cas d’une photo devenue célèbre (donc créée par l’inconscient collectif), l’interprétation de la réalité permet à cette photographie qu’elle soit  regardée sur une très longue période :  c’est là la puissance du média photographique inventé il y a plus de 200 ans. Aujourd’hui, nous ne connaissons pas encore la puissance de la technologie digitale. Tout ce que nous savons est qu’elle unifie le monde avec ses 7 milliards d’individus. Ils n’ont plus le temps de développer des films et ont besoin d’un système rapide pour leur images, moi je recherche autre chose…

Pourquoi certaines photographies survivent-elles ?
Je pense que l’intention de l’artiste est de donner un plus à ses oeuvres lorsqu’il photographie, peint, sculpte, il recherche un résultat qui le satisfait pendant une période la plus longue possible. Ex : Mona Lisa, le Bouddha endormi… ». Ralph Gibson à Bangkok 2012, extrait vidéo.

www.ralphgibson.com

Raymond Depardon

“Aujourd’hui avec le numérique, dès qu’on fait une photo on la voit sur son écran. Mais avec l’argentique, il fallait vingt-quatre heures pour développer ensuite… Je regardais la planche contact, et j’avais quelques minutes pour choisir et donner un tirage, et écrire un texte…

Souvent je descendais dans ce coffee shop pour réfléchir et placer une phrase qui m’était venue en marchant dans les rues. J’aimais bien ce jeu… du texte et de l’image. Il y avait un côté suspense à cette époque: le développement, le tirage, le texte, le coursier qui emporte le pli, le temps que l’image physique aille de NY à Paris.

Tout ça est révolu. C’est moins drôle aujourd’hui à cause de ça.”

Argentique et numérique par Henri G.

  • J’aime faire plouf plouf dans mon labo
  • J’aime le grain du film
  • J’aime le côté éternel d’un film (tout est relatif), son côté archive fiable
  • J’aime la précision du numérique
  • J’aime la capacité de travail du numérique
  • J’aime le faible coût du numérique
  • J’aime les grands films
  • J’aime les grands dépolis
  • J’aime les vieilles optiques à film
  • J’aime les filles qui ont du peps
  • J’aime le Chablis (vous le saviez).

Le point de vue de Joakim Malare

J’ai grandi autour des ordinateurs et simultanément développé un intérêt dans les différents arts, la plupart du temps la sculpture, la photographie et le dessin. Naturellement, je suis capable de m’exprimer librement avec la technologie numérique dans deux, trois et quatre dimensions.

Mais alors que ma compréhension et ma sensibilité artistique évoluait, j’ai réalisé qu’il y avait quelque chose qui manquait dans mon travail numérique. Bien sûr, superficiellement j’étais en mesure de reproduire des scênes de vie très réalistes, mais la version numérique manquait de chaleur. Parce que la sortie était calculée, il manquait des traces de l’intervention physique humaine et de la matière.

Si cela vous semble familier, comparez un croquis simple sur le papier avec un dessin numérique réalisé avec une tablette. Peu importe la façon dont vous synthétiser le réel, vous ne pourrez pas générer ce que les gens appellent l’âme, la chaleur, la présence…À certains moment, vous pourrez simuler de très prêt la réalité, mais les innombrables couches d’interfaces technologiques dont vous avez besoin pour intéragir sont là pour y parvenir.

Je crois que dans le but de se connecter avec vous même, vos sens et dans une certaine mesure avec votre inconscient, vous avez besoin d’un médium qui vous permette un flux continu qui part de esprit, à travers l’œil et la main. L’argument en faveur du processus traditionnel tient toujours. C’est celui du mouvement. Nos corps sont construits pour la mobilité et notre de vie est basée sur la coordination esprit-oeil-main – votre volonté, votre main, un outil et le résultat physique.

Voilà pourquoi j’ai plus de satisfaction dans ma chambre noire qu’à l’écran d’ordinateur. Le mouvement permet de conserver une certaine fraîcheur d’esprit.

Jean Turco

« Certains photographes nostalgiques de l’argentique, un rien intégristes, ne trouveront que des défauts au numérique et ne jureront que par l’argentique qu’ils estiment incomparablement meilleur que toutes ces nouveautés et techniques fondées sur l’informatique. Pourquoi pas ?

Personnellement, je me suis longtemps parfumé à l’hyposulfite et je continue à le faire pour développer mes 20X25 ou mes calotypes, mais je dois dire que je me passerais volontiers de cette odorante chimie si l’informatique pouvait la remplacer. »

Le point de vue d’Olivier Chauvignat

« En Photographie chimique, le photographe utilisait le choix du film, de la chimie, du papier comme des outils intervenant dans le rendu final. Ces choix influençaient l’aspect « plasticien » de la photographie, la « réponse » des contrastes, la tonalité et la restitution des couleurs, la sensation de « matière » associée à l’image elle-même. Au final, cette caractérisation allait influencer la réponse émotionnelle de la photographie, auprès du lecteur.
Telle qu’elle est délivrée par un boitier numérique (y compris pour un fichier RAW) et malgré un développement numérique personnalisé, l’image est totalement dépourvue de cet aspect plasticien. Cela a pour conséquence de donner des images au rendu complètement uniforme et identique, tous modèles et toutes marques confondues. En quelque sorte, cela revient à dire que – en terme de rendu – tous les photographes produisent tous les mêmes photos, quelque soit le matériel numérique utilisé ».

Autres points de vue

« Le film possède une qualité unique ; une beauté et une chaleur tonale que le numérique ne peut égaler. Comme le débat vinyl vs MP3 , il y a quelque chose de fondamentalement différent dans le processus physique par rapport à un monde virtuel » Rothwell .
« Alors que les fabricants d’appareils photo numériques ont fait de la photographie une question de mégapixels , un nombre croissant de gens comprennent que la qualité ne peut pas être exprimé en chiffres » Temoor Iqbal.
« Les non- artistes perdent malencontreusement leur temps à comparer les caractéristiques tels que la résolution ou le nombre de pixels, quand ils devraient s’abstenir et se concentrer sur les images .  »  Ken Rockwell.

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  • Pour la ceux qui préfèrent la couleur : voir les images réalisées par Ken en 35 mm avec de la Velvia 50
  • http://www.peopleandbeauty.com/tutoriels/le-rendu-de-la-photo-numerique
  • http://www.europeanceo.com/culture/film-photography-makes-a-stunning-comeback/

 

 

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