Etre photographe pendant l’ère Ceausescu
Bien que des chercheurs universitaires roumains, des muséographes ou des amateurs commencent à publier leurs recherches et leurs analyses sur la photographie roumaine des années 1950 à 1990, il y a peu de publications destinées au grand public.
L’art photographique n’étant pas perçu comme un art à part entière comme il se devrait, question de marché peut- être. ?
Au hasard de mes achats dans les foires à la brocante, je me suis aperçu qu’un nombre important de livres et cartes postales ont été édités pendant cette époque historique européenne et que certains noms revenaient plus que d’autres.
Une liste non exhaustive peut être établie :
C.Vadu , F.Dumitru, Ion.Nadrag, Al. Mendrea, .Comanescu ; M.Volbura, Iosif. Marx, Clara Spitzer, I.Oprea, Al.Florescu, St.Dumitru, Fl.Suler, A.IIancu,V.Stamate,A.Critescu,Tereza Pupeza, Fred Nuss ,G.Gaciu, I.Ariton, etc etc
dont ressortent à mon avis, quelques noms, sur lesquels il me semble intéressant de s’arrêter en espérant que des travaux de recherches plus amples montreront ces œuvres photographiques
1) Ion Miclea :
Il a débuté au journal Faclia de Cluj en 1954 pour travailler ensuite au journal le Contemporain de Bucarest en 1962.
Selon les témoignages de son épouse et des quelques articles de presse faites sur son travail, le tournant de sa vie professionnelle peut être daté de 1969 lors de la visite de Nixon en Roumanie. Ion Miclea fut le seul photographe roumain habilité, grâce à sa relation amicale avec un diplomate américain. L’image de presse fit le tour du monde.
Ceausescu en eut vent et lui demanda d’être le photographe officiel bien que Miclea ne fusse membre du parti .Il fut surnommé le photographe de Ceaucescu.
Les 10 années d’accompagnement des tournées mondiales et officielles seront interrompues à la fin de 1980 quand le photographe refusera d’accompagner Ceausescu en Angleterre, son père étant mourant.
Notre photographe discret et toujours souriant décédera en 2000 vivant dans la simplicité et la modestie après une vie bien remplie quand, entre les années 1960 et 1990, il illustrera journaux et revues, livres de voyages et livres pour enfants, des publicités, immortalisera les acteurs de théâtre ou les personnages politiques importants de l’époque…
Je soulignerai seulement deux livres parmi la multitude de ses publications :
- Statele Unite a le Americii. Les Etats Unis d’Amérique : un livre édité en 1976 par Editura Meridiane et préfacé par Gerald Ford. Mr Miclea sera invité par le service de presse de la Maison Blanche parmi 11 photographes mondiaux à l’occasion du bicentenaire des USA. Seul photographe des pays de l’Est.
- Romania, Paminturi Eterne. Roumanie, Terres éternelles éditées par Transylvania en 1982. Préfacé de Radu Florescu et commentaires de Corneliu Bucur. Deux noms importants de la culture contemporaine roumaine, Ion Miclea sera fier de cet ouvrage
Parmi les nombreux prix, médailles parfois décernées par des souverains, je voudrais mentionner les diplômes d’honneur à l’exposition mondiale des photographes de presse World Press Photo 1963 et 1965.
2) Hedy loffler-Weisselberger :
Prolifique photographe que nous retrouvons dans plusieurs albums de voyages édités par editura Meridiane, editura sport –turism de Bucarest (Paris, Naples, Pologne,…) des portraits d’écrivains dans Bukarest Kriterion Verlag et cartes postales notamment du littoral de la Mer Noire.
Il semble qu’elle soit répertoriée aussi dans Aktfotografie Fisher 1979 dans un travail collectif ayant pour thème la photographie érotique en provenance des pays de l’Est pendant l’ère communiste ?
Dès 1956, elle sera membre fondateur de l’Association des Artistes Photographes de Roumanie.
Je retiendrai deux livres :
- Belgia : Editura sport-turism Bucuesti 1977 préface de Ioan Grigorescu. Bien au-delà d’un simple livre de voyages où ressort l’architecture sous un ciel si bas comme l’a bien chanté Jacques Brel, une rencontre avec les gens dans leurs occupations journalières. Un bon travail très bien imprimé.
- Copii, copii : enfants Editura Meridiane Bucuresti 1968 textes de Mircea Sintimbreabu.Un charmant petit livre format carré 22/22 cm. La candeur et l’insouciance de l’enfant non préoccupé de la présence de l’appareil photo. Je pense à Photographing Children de W Suschitzky.
3) Sandu Mendrea
Né en 1930, il deviendra photographe, renonçant à son travail de directeur de films documentaires devenus films de propagandes dès 1956.
Il quittera la Roumanie, en 1986 pour Israël, devant les difficultés du pays sous l’emprise du système.
Il travaillera comme tous les autres pour des raisons alimentaires dans l’édition de cartes postales touristiques
Excellence EFIAP en 1965 et plus de 200 prix nationaux et internationaux.
New-York : Editura Sport-turism 1976
Un livre à avoir dans sa bibliothèque entre William Klein et louis Stettnert !
4) Dan Er.Grigoresu (1917-1990)
Photographe à plusieurs facettes.
Il photographiera les œuvres de Brancusi ou des peintres roumains internationaux classiques ou contemporains pour des livres d’art (Ciucurencu, Braque, Kandinsky, Calder, Blake, Chagall etc.).
Lors de la biennale de Venise de 1982, une de ses photos, tirée en grand, célébrera La porte du baiser, œuvre monumentale de Brancusi de la ville de Targu-jiu.
Il décédera 2 mois, après les événements politiques de Roumanie de 1989, à Paris qu’il aura photographié magistralement.
En 1972, l’essayiste italien Giancarlo Vigorelli comparera l’oeuvre de Dan Er.Grigorescu à celles de Bishof, HCB, Avedon etc.
- Paris : Editura Meridiane 1970 : texte de l’académicien Dan Haulica, délégué permanent de la Roumanie auprès de l’Unesco. Le livre m’est dédicacé par son ami Dan Haulica : Retour sur une expérience qui me reste chère sous le signe des perspectives visuelles et sentimentales réunissant des recherches en résonance. Sibiu 9/10/2003
De la photographie humaniste tels Doisneau, Brassai, Ronis, etc. faite avec du temps au temps, à pied et pendant toutes les saisons, l’appareil en bandoulière.
Ces quelques photographes choisis subjectivement à partir de ballades visuelles entre des livres d’occasions, des cartes postales abandonnés, des souvenirs rapportés dans la presse populaire et quelques études méconnues par des amateurs ou des universitaires ne peuvent cacher ce patrimoine photographique réalisé dans une époque politique parfois troublée.
J’engagerai des français soucieux d’aider à mettre en valeur ce patrimoine européen, qu’il soit contemporain ou historique à trouver des moyens de collaboration culturelle entre les deux pays dans ce domaine, car pour beaucoup encore, la France est la patrie de la PHOTOGRAPHIE ….et pas seulement.
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