Les Frères Reutlinger
De 1850 à 1930, le studio Reutlinger a fait partie de ces entreprises qui ont porté la renommé de Paris et donné une certaine vision de la France, celle du luxe, de la culture et de l’insouciance.
Le fondateur Charles Reutlinger (1816-1881), né à Karlsruhe, eut un court temps un studio de photographie à Stuttgart vers 1848-49 où il pratique la daguerréotypie pour venir ensuite s’installer à Paris en 1850 au 112 rue de Richelieu et ensuite ouvre un autre studio au 21 bd Montmartre et enfin au 131 rue de Flandre.
L’entreprise est florissante parce que la société s’industrialise, une nouvelle partie de la population a des moyens financiers et un appétit pour avoir son image sur le papier, tant sur la carte de visite et plus tard sur la carte cabinet plus grande et surtout parce que Charles est un technicien organisé et sérieux comme l’écrira un journaliste anglais en 1867.
Sa clientèle est axée sur la bourgeoisie naissante, sur les hommes politiques et sur les artistes qui se font l’écho d’un Paris ville lumière.
Des médailles aux expositions internationales de Londres, Paris Berlin Hambourg, Wien récompensent le travail de ce photographe qui, de 9 heures à 17 heures, reçoit avec bienveillance ses clients dans le studio vitré à la lumière du jour.
Un travail certainement acharné puisque la concurrence est dure avec Ken et Provot pas loin et tant d’autres comme des Disderi , Nadar,Carjat ,Legray etc…
Charles Reutlinger
(1816-1881)
En 1880, Charles passe le flambeau à son frère Emile qui, s’ il est moins brillant peut être, amènera un sang neuf venu du Pérou en la personne de son fils Léopold qui donnera alors l’image du studio Reutlinger que nous connaissons aujourd’hui .
Léopold, né en 1863 à Callao (ou vivant à Callao ?) au Pérou, arrivera donc à l’age de 20 ans, dans le studio déjà connu de son oncle et de son père, lui donnant une nouvelle impulsion par un sens inné de la publicité, de l’utilisation de la presse donnant des images qui deviendront des icônes, certaines sensuelles que nous qualifierions de glamour mais aussi seront des témoignages aujourd’hui recherchés par les collectionneurs et les musées.
Citons quelques noms d’un ample catalogue :
Manet , Sarah Bernard , Mata-Hari , la belle Otero , les as de l’ aviation Guynemer et Nungesser, les grands musiciens de l’époque et surtout, ce que nous pouvons trouver encore grâce à l’immense production de la carte postale des années 1890- 1910, ces demi mondaines, ces artistes en devenir du théâtre ou de l’opéra et même, des brûleuses de cœur…
Léopold sur Wikipedia
A partir de ma collection personnelle, prenons quelques exemples qui pourraient être source d’inspiration pour de jeunes photographes . Pourquoi pas ?
Je dirai quelques mots de ces modèles.
- Une des sœurs Mante dont le père sera un inventeur de la photographie en couleur. Léopold est donc en contact avec les techniques en cours, la recherche des procèdés. les soeurs Mante serviront de modèle à Degas
- La Cruche Cassée : une reconstitution de la peinture de Creuse , le modèle inconnu est superbement éclairé dans le studio
- Eve lavallière, actrice de théâtre sera un modèle bien vu par le photographe. De nombreuses cartes postales la représenteront en robe longue élégante, avec des chapeaux à plumes, en différents personnages comme Napoléon 1er ou en jolie bourgeoise.
- Sarah Bernard, l’actrice dont le monde entier se partagera la présence sur les tréteaux. Elle aura compris le rôle de l’image dans sa carrière et saura monnayer son look auprès de tous les bons photographes de l’époque
- Liane de Pougy aura une vie des plus mouvementée ou romancée, mariée un temps avec le prince Ghika de Roumanie.
Un exemple de cartes postales Art Nouveau, peinte à la main.
Les cartes format cabinet feront bien du tord à Disderi et sa carte de visite. La technique évolue et l’espace au dos est aussi plus propice à la publicité du studio
Reutlinger Nadar , Sebbing , etc. nous offrent des jeunes femmes plantureuses dans diverses situations de la vie de la parisienne sur les grands boulevards , dans le lit , sur la balançoire , riant aux éclats ou se pâmant de chagrin.
Reutlinger est chef de file dans ces albums le Panorama Hebdomadaire, nos jolies actrices chez Baschet éditeur Paris
Sur 35 cm de large, des albums à feuilleter !
Des montages avec des vues extérieurs rappellent que nous sommes bien sur les grands boulevards et en regardant bien, on y voit l’enseigne du studio Reutlinger. Subtile Publicité.
Une carte postale plus tardive mais le parisien s’y reconnaîtra.
Nos actrices n’hésitent pas à prendre leur bain sous le regard de l’objectif .un décor peint, un montage, un sein qui apparaît …une scène touchante !
Female Nudes Against Floral Textile Background, Attributed to Leopold Reutlinger, 1890
Hélas, la vie n’est pas toujours aussi rose que le montre ces cartes et illustrations un peu coquines.
Léopold perdra un œil dans un accident stupide l’obligeant à arrêter son travail en 1930 et aussi un drame personnel en la perte de son fils Jean dès les premiers jours de la première guerre, un artiste lui aussi photographe prometteur, metteront fin à la dynastie de ces photographes PARISIENS d’exception.
Une grande partie du fonds des archives se trouve à la Bibliothèque Nationale à Paris.
Photographie faite par hasard dans un café parisien dont je ne me rappelle ni le lieu ni la date. Au mur, un de ces portraits des belles femmes de Paris ? Coll ellge
Il y a beaucoup de publications sur les Reutlinger. J’en cite quelques unes en soulignant l’exposition faite à l’Alliance Française de Lima, Pérou ou aura vécu Léopold 20 ans de sa jeunesse.
Une partie moins connue de l’histoire du studio Reutlinger serait aussi de développer la relation professionnelle et amicale avec ses apprentis photographes ou collaborateurs tel le hongrois Pal Funk Angelo qui laissera son nom plus tard dans la photographie hongroise ou le roumain Leon Wandelmann De Bucarest. A suivre donc !
http://blogs.elcomercio.pe/saldetucasa/2009/02/el-glamour-de-reutlinger-del-c.html
Galería « Le carré d’art » de la Alianza Francesa. Av. Javier Prado Este 5595, La Molina.Elsa Herrera-Quiñonez en la galería Le Carré de A’rt, Lima
El Glamour de Reutlinger:
del Callao a París
– Die Schonen von Paris: Fotografien aus der Belle Epoque, Leopold Reutlinger, 1981
Leopold Reutlinger, Robert Lebeck , 1979
http://www.answers.com/topic/reutlinger-3#ixzz2KiHAxsD3
http://cabinetcardgallery.wordpress.com/category/photographer-reutlinger/
http://www.past-to-present.com/photographer.cfm?lastname=REUTLINGER&indice=1&fp=1
Bourgeron, Jean-Pierre, Les Reutlinger: Photographes à Paris 1850-1937, préface by Jean-Pierre Seguin, Paris: J.-P. Bour¬geron, c. 1979.
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